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martes, 19 de abril de 2016



ACTUALITÉ CULTUREL


 La XVe Biennale d'architecture de Venise 

par Paolo Baratta



Paolo Baratta, directeur de la Biennale d’Architecture de Venise a prononcé un discours ce mercredi 24 février présentant les grandes lignes de la quinzième édition de l’événement dont le commissariat est assuré par Alejandro Aravena. Parmi les objectifs fixés, il s’agit de «montrer la naissance de la demande d’architecture, la manifestation et l'expression des besoins et des souhaits, [d’] identifier les processus logiques, institutionnels, juridiques, politiques et administratifs qui ont suscité une demande pour l’architecture, et donc permis à l’architecture de trouver des solutions autres que banales ou autodestructrices».

Biennale d'Architecture de Venise 

La femme dans l’escalier qui, en gravant les marches plus hautes, peut scruter un horizon plus large et ainsi conquérir son propre ‘expanded eye’, annonce la 15e Biennale d’Architecture dont le commissariat général a été confié à Alejandro Aravena.
C’est une image qui nous a immédiatement séduits. Aussi parce qu'elle représente un peu toute la Biennale, nos possibilités et nos objectifs.
Cette image s’oppose en partie à celle utilisée pour la dernière Biennale Arte. Okwui Enwezor avait choisi en 2015 comme symbole de référence le très fameux ‘Angelus Novus’ de Paul Klee, selon l’interprétation de Walter Benjamin ; l’ange ailé qui regarde en arrière, effrayé, qui voit seulement le passé et dans le passé, outre des ruines et des tragédies, des illuminations qui pourraient lui être utiles demain, dans le futur vers lequel le poussent les forces occultes providentielles, comme un vent qui souffle sur ses ailes.
Que voit la femme ? Je crois surtout qu’elle voit un territoire ravagé, composé d’immenses zones habitées par l’homme et dont l’homme certainement ne peut pas être fier, un territoire encombré de réalisations très décevantes qui représentent un triste nombre infini d’occasions manquées pour l’intelligence et l’action de la civilisation humaine. Elle voit beaucoup de réalités tragiques, d’autres banales, qui semblent marquer la disparition de l’architecture. Mais elle voit aussi des signes de nouvelles créativités et des résultats qui poussent à espérer, signes qu’elle voit dans le présent, et non dans le futur incertain des espoirs et de l’idéologie.
S’agit-il d’un signe d’optimisme ?
Nous avons plusieurs fois déploré, en inaugurant les précédentes Biennales, que le temps présent semblait se caractériser par une séparation entre architecture et société civile et ce thème avait été abordé de différentes manières. Avec cette nouvelle Biennale nous voulons repérer d’une façon plus explicite la présence des phénomènes montrant les nouvelles tendances de renouvellement ; nous rechercherons des messages encourageants.
Ce qui nous intéresse aujourd’hui ce n'est pas seulement de montrer les résultats obtenus, à soumettre à la critique, mais aussi la phénoménologie des processus de réalisation dans des exemples positifs. Montrer la naissance de la demande d’architecture, la manifestation et l'expression des besoins et des souhaits, identifier les processus logiques, institutionnels, juridiques, politiques et administratifs qui ont suscité une demande pour l’architecture, et donc permis à l’architecture de trouver des solutions autres que banales ou autodestructrices.
Car ici il y a certainement une impasse sérieuse ; pas tellement dans l’architecture comme discipline, mais dans l’organisation humaine, dans notre capacité à l’utiliser et à faire appel à elle en entretenant avec elle un dialogue. Problèmes complexes qui embrassent plusieurs domaines. Problèmes que peut-être l’on peut résoudre facilement quand l’architecture se limite à s’exprimer dans des phénomènes spectaculaires isolés. Mais problèmes plus complexes à résoudre quand il s’agit du territoire et des conditions de vie et de travail d’un individu ou de communautés entières.
Dans les cas de résultats positifs, nous ressentons le besoin de mettre en évidence comment se sont enchaînées les décisions qui lient besoin, conscience, opportunité, choix et réalisations pour avoir un résultat où “l’architecture fait la différence”, comme l’affirme Alejandro Aravena.
L’architecture nous intéresse en tant qu’instrument de self-government, comme instrument d’une civilisation humanistique, pas comme un style formel, mais comme une mise en valeur de la capacité de l’homme à être maître de ses propres destins.
L’architecture nous intéresse quand elle est en action, comme instrument de la vie sociale et politique, quand on lui demande de conjuguer à un niveau plus haut l’agir privé et les conséquences publiques.
Ce qui nous intéresse c’est la conscience que l’architecture, si est utile pour conduire la réalisation de biens publics, elle devient elle-même un bien public, selon la définition technique du terme (un bien dont la jouissance de la part d’un individu ne réduit pas les possibilités de jouissance de la part des autres). Comme tous les biens publics elle peut naître d’une intervention publique directe ou d’une sensibilité plus élevée manifestée par celui qui fait des interventions privées. Ces dernières étant une condition qui n’exige pas la bienveillance du privé, mais seulement la connaissance des différents “moi” qui sont en chacun de nous, et la conscience que notre espace de vie est une question plus ample de l’espace que nous occupons.
Présenter l’architecture en action c’est aussi répondre à la question récurrente que se pose la
Biennale : qu’est-ce qu’une exposition d’architecture ? et quoi doit être une Biennale d’Architecture? Dans la Biennale Arte, dont celle d’Architecture est la fille, les oeuvres sont devant le visiteur ; pour l’exposition d’architecture les oeuvres sont ailleurs. Que doit-on présenter ici ?
C’est en fait une recherche continue. Nous devons éviter d’être la copie d’une revue, d’imiter un congrès ou un essai critique, de créer un lieu dédié seulement aux adeptes. Nous devons éviter de faire une exposition consacrée seulement aux architectes et d’être condescendants avec leur possible tentation de se présenter comme artistes.
Nous devons parler au public, à tous les possibles acteurs responsables des décisions et des actions avec lesquelles se réalise l’espace de notre vivre individuellement ou ensemble.
Si l’Architecture est la plus politique des arts, la Biennale d’architecture ne peut que le reconnaître. La Biennale sera accompagnée de beaucoup de rencontres avec des architectes et acteurs des phénomènes présentés ; nous voulons voir le fruit de leur travail mais aussi les entendre parler de leur engagement.
Hormis l’Exposition principale dont Aravena sera le commissaire, auront lieu les expositions des pavillons des 62 pays participants, et plusieurs expositions collatérales.
La Biennale consacrera trois pavillons à ‘Projets Spéciaux’: le premier promu par la Biennale même, les deux autres fruits d’accords signés avec d’autres institutions.
En particulier, le Projet Spécial Forte Marghera, Reporting from Marghera and Other Waterfronts, dirigé par l’architecte Stefano Recalcati, analysera dans le Pavillon situé à Forte Marghera (Mestre, Venise) d’importants projets de régénération urbaine de ports industriels, contribuant ainsi à réaliser une réflexion sur la reconversion productive de Porto Marghera.
L’accord de collaboration avec le Victoria and Albert Museum de Londres permettra l’ouverture dans les Sale d’Armi à l’Arsenal d’un pavillon dédié aux arts appliqués, A World of Fragile Parts, dont le commissaire sera Brendan Cormier.
En prévision de la conférence mondiale des Nations Unies – Habitat III, qui aura lieu à Quito en Ecuador en Octobre 2016, nous consacrerons un pavillon aux thèmes de l’urbanisation – Report from Cities : Conflicts of an Urban Age - avec une attention particulière au rapport entre espaces publics et espaces privés. Il sera réalisé en collaboration avec Urban Age, dont la London School of Economics (LSE) et la Alfred Herrhausen Society sont les organisateurs, et Ricky Burdett en sera le commissaire. La conférence Urban Age de cette année aura lieu à l’intérieur de la Mostra.
Le projet Biennale Sessions est déjà en cours : environ 58 facultés d’architecture du monde entier y ont adhéré.
Nous remercions le Ministero dei Beni e delle Attività Culturali e del Turismo et les institutions territoriales qui, de diverses manières, soutiennent la Biennale : la Ville de Venise et la Région de la Vénétie.
Un remerciement spécial va à notre Partner Rolex. Nous remercions les Sponsors pour leur assistance et contribution, et les Mécènes pour leurs importantes apports pour la réalisation de cette 15e Mostra. Nos remerciements vont aussi en particulier à Alejandro Aravena et à toute son équipe.
Un grand merci enfin à tout les grands professionnels de la Biennale pour leur dévouement dans la réalisation de la Mostra et la gestion pendant le six mois de sa durée.
Paolo Baratta


info: Le courrier de l’architecte

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